L’alimentation saine, un débat toujours d’actualité à l’heure de la refonte du guide alimentaire canadien

Par Sylvie Rousseau ND.A.

Les chercheurs dans le domaine de la nutrition ne cessent de se questionner sur la possibilité que nous avons de contrôler le vieillissement grâce à nos choix alimentaires.  Selon leurs dires, ce n’est pas les années qui détériorent notre corps, mais plutôt le régime alimentaire et le mode de vie que nous choisissons.

Ils affirment qu’il serait possible de ralentir la dégradation progressive du corps due au vieillissement et que nous serions capable de vivre longtemps et en santé.  Ils associent ce phénomène à l’effet cumulatif des carences alimentaires.  Même si le vieillissement est un processus continu et inévitable, le corps a la capacité de se garder en santé longtemps si les bons choix alimentaires sont faits.  Consommer des aliments riches en éléments nutritifs permet à nos milliards de cellules de fonctionner à pleine capacité et de se réparer et de se régénérer.

L’alimentation devient pour bon nombre de gens non seulement un plaisir et un besoin essentiel mais aussi un gage de santé et de forme.  Hippocrate disait : « Que ton aliment soit ton médicament et que ton médicament soit ton aliment ».  Aujourd’hui, on commence à découvrir toute la véracité de ses dires.  Entre autre, on a démontré la valeur d’un grand nombre de substances d’origine végétale dont le lycopène trouvé dans la tomate, la lutéine dans la myrtille ou l’extrait de pépin de raisin dans le raisin qui a la capacité de nous protéger du vieillissement et des maladies dégénératives.  La consommation régulière de fruits et de légumes nous protège d’un nombre incalculable de problèmes de santé.

Le guide alimentaire canadien de 2008

Le guide alimentaire canadien qui était en vigueur jusqu’à tout récemment valorisaient beaucoup les céréales avec 5 à 12 portions, puis les légumes et les fruits (5 à 10 portions).  Venaient ensuite les produits laitiers qui tenaient une place importante avec une recommandation tournant autour de 2 à 4 portions et finalement les viandes et substituts (2 à 3 portions).

Nos experts officiels de la nutrition, soit les diététistes, ont comparé ce guide lors de sa refonte et les recommandations officielles du professeur Willet de Harvard plus en lien avec les guides asiatique et méditerranéen.  Le président de l’Ordre professionnel des diététistes du Québec, M. Paul-Guy Duhamel, indiquait alors que le guide alimentaire canadien ne faisait pas la différence en ce qui concerne la qualité des aliments dont les céréales entières en rapport avec les céréales raffinées.  On retrouvait la même situation pour les types de gras et les protéines recommandés.

Il ajoutait de plus : « Mais, cet outil, le guide alimentaire, n’est pas nécessairement un consensus scientifique, mais un consensus politique ».  En effet, beaucoup de monde dont les intérêts ne sont pas toujours en santé publique ont voulu mettre leur grain de sel dans l’établissement de ce que devait être la politique officielle du gouvernement en matière de nutrition.  Il citait l’exemple du lobby exercé par les producteurs de viande rouge ne voulant pas reconnaître la différence entre les différents types de viandes.  Les producteurs de produits laitiers ont aussi influencé à la hausse les recommandations gouvernementales pour la consommation des produits laitiers alors que les chercheurs de Harvard croient que l’adulte moyen n’a pas besoin d’autant de produits laitiers.

Prise deux pour un guide alimentaire canadien amélioré

Bonne nouvelle, dix ans après sa dernière parution, un nouveau guide alimentaire canadien vient d’être lancé, janvier 2019.  En effet, le rapport du comité sénatorial permanent des affaires sociales recommandait à Santé Canada en mars 2016 de réviser le guide rapidement, car il était dépassé. Il demandait cette fois l’exclusion de représentants de l’industrie agroalimentaire dans le processus de renouvellement du guide.

Du coté des professionnels de l’alimentation, on sentait l’urgence de voir le remplacement de la version 2008. Lors de la présentation de Santé Canada au congrès annuel de l’Ordre professionnel des diététistes du Québec à l’automne 2016, quelques témoignages ont été très éloquents à ce sujet dont celui de la nutritionniste Hélène Laurendeau : «Ce guide, c’est une honte à ma profession. C’est tellement déconnecté d’où nous sommes rendus.»

Ottawa a manifesté de grandes intentions à la refonte complète du guide alimentaire dont l’intention d’éliminer les gras trans des produits transformés et de réduire leur teneur en sel, la volonté de mieux étiqueter les aliments et de limiter la publicité d’aliments malsains destinée aux enfants.

Il est définitivement plus pertinent, pratique et dans un langage simple, facile à comprendre et à mémoriser. Les messages peuvent être saisis en un coup d’œil : moins de gras saturés et plus de fibres, moins de viande et plus de fruits et de légumes, moins d’aliments transformés. L’accent qui a été mis sur la consommation de protéines de source végétale amène aussi une couleur écologique à ce nouveau guide.

Intéressant, le nouveau Guide alimentaire canadien met en garde contre un problème croissant dans la société, la consommation d’alcool et ses risques sur la santé.  En effet, les chercheurs dans le domaine de  la nutrition se préoccupent de plus en plus des liens entre alcool, obésité et cancers.  On mentionne aussi que «l’eau devrait être la boisson de premier choix».  On déconseille ainsi la consommation de boissons sucrées.

De nombreux groupes et experts ont félicité Santé Canada de l’arrivée de cette nouvelle mouture du guide.« Le nouveau guide est une véritable révolution par rapport au précédent. Je l’accueille très favorablement, s’est réjouie Stéphanie Chevalier, professeure à la Faculté des sciences de l’agriculture et de l’environnement de l’Université McGill. Exit le calcul de portions et mettons l’accent sur la qualité de la diète et de nos aliments et sur le contexte global de l’acte de manger. »

 

L’alimentation et le vieillissement

Il est certain que l’on ne peut échapper à l’emprise du temps ni modifier son bagage génétique, mais indépendamment de notre âge, nous avons la capacité de jouir d’une meilleure santé en décidant de mettre en pratique des bonnes habitudes alimentaires soit en consommant des fruits et légumes biologiques frais et colorés, des protéines maigres, des céréales entières (hypoallergènes) et des bons gras et en limitant les aliments qui font du tort à notre corps comme le sel de table, le sucre, les condiments chimiques, les aliments frits, les produits laitiers gras ou les produits de boulangerie commerciale.   À cet égard, le nouveau guide alimentaire nous amène sur une nouvelle lancée.  Il n’est pas parfait, mais il est quand même prometteur du virage nécessaire que la population doit faire pour améliorer la longévité mais surtout la qualité de vie collective.

Références :

  1. GRACI, Sam, Les superaliments, Chenelière/McGraw-Hill.
  2. HAYES, Dr Donald, 7 habits of healthy aging, Actual age.
  3. http://collections.banq.qc.ca/lapresse/src/cahiers/2002/11/23/A/82812_20021123A.pdf
  4. http://www.lapresse.ca/actualites/201611/25/01-5045417-refonte-du-guide-alimentaire-sante-canada-prend-ses-distances-de-lindustrie.php
  5. http://www.lapresse.ca/actualites/sante/201610/24/01-5033596-un-nouveau-guide-alimentaire-canadien-au-plus-tard-en-2019.php
  6. https://www.lapresse.ca/actualites/national/201901/23/01-5212147-le-guide-alimentaire-aborde-de-front-lalcool.php
  7. https://www.journaldemontreal.com/2019/01/22/nouveau-guide-alimentaire-canadien-fini-les-groupes-alimentaires-et-les-portions